jeudi 20 mars 2014

Capharnaüm... entre cour et cuisine. 24.

24/
La pomme et les bourgeons.

Une promenade autour de la bâtisse, comme ça, pour rien, pour regarder toutes les autres maisons, certaines qui autrefois devaient être fastueuses, certaines franchement décrépies, d'autres humbles, mais toutes closes.
Le soleil discret me réchauffe comme il réchauffe le doré des pierres de la cité, fait briller quelques écailles des volets fermés. Allure lente, main qui se pose sur des portes qui semblent pourtant prêtes à se briser, résistant d'une serrure hors d'âge. Au bout de cette rue que hante l'abandon, l'odeur qui émane de la devanture d'un fleuriste.
Et là, alors que quelques voitures singent la circulation de la vie dans des artères poussives, apparait la pomme.
Mais je ne la vois pas encore ainsi, pour le moment, elle n'est que lavande, pervenches.
Un grand placard de bleus passés d'une mode surannée, une jardinière à la masse bleue flottante comme un bouquet aux fins pétales soyeux dansant autour de frêles tiges sèches.
Chaussée de bottines noires et fourrées, retournées sur des chaussettes noires qui plissent jusque sous le mollet. Des jambes si fines qu'elles ne sont plus réduites qu'à l'os, un peu de chair, et une peau blanche et fine, si fine qu'elle se parchemine, brillante, cassante, qui se donne à voir jusqu'aux genoux. Au dessus, les pétales virevoltants en forme de robe Damart ou la Blanche Porte qui recouvrent la plante séchée, laissant ses bras dénudés, à la même peau fine comme une pelure d'oignon que ses jambes chétives.
Comme elle marche lentement, j'arrive à son niveau, et c'est là que je découvre son visage.
Il est ridé tel une pomme oubliée au fond d'un garde-manger et dont l'eau se serait évaporé, recroquevillant sa peau sur sa chair fondue par le temps. Sa bouche édentée est comme ces irrégularités d'une golden ayant été percée par une branche mitoyenne et invasive, les rides y convergeant.
Mais plus que son visage, c'est la main de la pomme qui me surprend.
Elle tient, serré dans son poing comme un porte drapeau présente sa flamme, trois roses jaunes dans leur papier cristal.
Je ralentis, la laisse me dépasser et cale mon pas sur le sien, et suis la pomme en imaginant...
Pour qui sont ces roses qu'elle a acheté? Les a t'elle acheté d'ailleurs, ne serait-ce pas un galant qui les lui a commandé, et comme un amoureux espiègle, lui a juste donné comme indice le nom de la boutique où elle devait se rendre? Elles ne sont pas rouges, elles sont jaunes. La pomme n'aurait donc pas livré son nectar à celui qui doit souhaiter  y goûter, peut être est il timide...
La pomme avance lentement, mais le bras reste vaillant et les roses semblent dressées comme une arme pour pourfendre l'idée que l'amour ne vaut que jeune, vaillant et frais...
L'imagination continue son chemin, s'éteint. Cette route, ça pourrait être celle du cimetière, mais elle ne passe que devant le collège dont la sonnerie vient de retentir et des portes duquel s'égayent des adolescents.
La pomme a changé de trottoir, me laissant avec les possibles de ces roses fraîches dans sa main flétrie...
Sur mon trottoir, ce sont désormais les  jeunes pousses qui s'offrent à mon regard.
C'est le premier jour du printemps, la sève monte le long des troncs vigoureux et la nature, comme les faciès adolescents, s'embourgeonne.
Pas de roses, de communication kabbalistique en fonction du nombre, de la couleur, de la fleur offerte, mais des portables qui échangent des "<3", des "love", des JTM.
Pas beaucoup de rêve, de la technologie, peu de romantisme, beaucoup de rentre dedans.
Aujourd'hui, je me sens plus proche de la pomme.
Parce qu'hier, j'ai reçu deux rosiers, un jour en avance.
J'ai lu, j'ai regardé, me suis renseigné sur comment les planter.
Puis je suis allée dans la cour, me suis posée pour voir où ils seraient le mieux pour pousser..
Le choix fait, j'ai réalisé un muret de pierres sèches, vidé des jardinières à l'intérieur, suis allée acheter un sac de terreau, les ai planté à cet angle de mur, à peine éloignés, que l'un n'étouffe pas l'autre mais qu'ils croissent pourtant ensemble dans cet arc de cercle...

Il y a un rosier blanc, et un rosier rouge...

Un jour, si vous êtes sages, et si l'envie m'en prend, tata miaoum vous parlera de la cérémonie des roses...


lundi 17 mars 2014

De Mater à Master...

Dans ce texte, je ne parle que du cas de figure Maître/soumise parce que c'est ce que je connais le mieux, de mon expérience et de mes "consœurs", et il faut admettre les présupposés suivants:
l'enfant comme la mère sont "conscients" et choisissent leur famille,
les aspirations de l'entité bdsm décrite sont celle non pas d'une relation exclusivement sexuelle / SM / 5 à sexe ou d'un couple cherchant à obtenir le prix de " la meilleure chienne" mais de deux personnes s'épanouissant  autant dans leurs individualités propres qu'au sein de la relation...

De Mater à Master, il n'y a que le S de sexe qui change...

A bien y réfléchir, on entend souvent parler de l’éducation de la soumise...
A bien y réfléchir, une relation Maître/soumise, n'est pas si éloignée de celle d'une mère à ses enfants...

Certes vous pourriez dire que l'enfant n'a pas choisit ses parents, mais si vous lisez Dolto, elle vous assure que l'enfant à concevoir n'est pas que la résultante d'une forniquation et rejoint d'autres aussi qui vous parlent du "choix" des âmes d'intégrer telle ou telle famille pour y guérir ses plaies et dysfonctionnements passés..
Et cette vision me plait bien.

Pour une relation D/s, nous nous retrouvons donc dans le même cas de figure qu'une mère désirant un enfant:

Le Dom souhaite une soumise dont il prendra soin, qu'il fera "grandir" (pas simplement sexuellement et c'est là que le "S de sexe" prend son sens) mais dans ma vision des choses dans l'acceptation, la reconnaissance de ce qu'elle est (et je ne parle pas de "la soumise qui est en toi, qui ne demande qu'à être dressée, salope", mais d') une femme entière, complète, qui s'accepte et se réconcilie, sous l'oeil bienveillant du Maître.
La soumise souhaite un Dom qui exprime d'elle le meilleur, qui, au travers des yeux de cet homme aimé, découvre son reflet sublimé qui n'est pourtant que la réalité qu'elle ne voyait, vivait plus, dont elle n'avait pas/plus conscience...
N'est ce pas là la même dynamique que celle d'une mère consciente de ses responsabilités, du petit enfant aimé et dont la mère est une déesse toute puissante?

Pour autant il n'est pas question d'infantilisation (ni d'ABDL ou d'age play*),  puisque l'infantilisation, la gagatisation, la déresponsabilisation ne font pas partie de ma vision de l'éducation des enfants.
Élever un enfant, c'est le considérer comme une personne à part entière, avec une personnalité propre, en tâchant de faire pour le mieux sans attendre de retour (parce que de toute façon les enfants sont ingrats, il n'y a qu'à voir les successions déchirant les fratries...), lui imposer des règles selon les principes qui me tiennent à cœur, en les adaptant lorsque le besoin s'en fait sentir et si elles s'avèrent négociables, lui transmettre des valeurs sans pour autant cacher que d'autres existent, ailleurs.
Bref être mère, c'est être présente et à l'écoute d'une personne qui, pour quelques années, on est tout... En échange du respect et de l'écoute, encore...

C'est drôle, c'est un cercle vertueux qui me rappelle quelque chose dans le cadre d'une relation D/s, non? Pas vous?

Pour élever un enfant, il faut de la présence, des attentions, de la communication...
Combien d'enfants ayant des géniteurs et leur "parents" qui ne sont pas les mêmes, mais simplement ceux qui étaient là, les ont aimé?
Quoiqu'il advienne, savoir que l'enfant peut se tourner vers sa mère, même en lui ayant mordu la main au sang d'avoir écouté le chants des sirènes, qu'elle lui laissera le temps de s'en rendre compte, de... grandir... et comprendre, grâce aux armes qu'elle lui aura fourni. Savoir qu'élever un enfant, c'est répéter, être là, toujours. Peut être ne pas le dire sans cesse, mais que l'enfant sache qu'il est aimé, par des attentions, des gestes, de l'écoute, encore... Reconnaitre ses failles pour se montrer humain, pour ne pas laisser de place à l'envie d'aller y fouiller pour blesser, ne pas être sanctifiée déraisonnablement, une mère, mais une femme...

Humaine, simplement.

En temps que soumise, j'aspire à ce type d'interactions, avoir sous Son regard indulgent la possibilité de m'épanouir, de me (re)construire une identité qui ne soit plus parcellaire, regroupant enfin la femme, la putain, la pétasse, la docte, la maçon...

Comme je montre à mes enfants que je les aime en leur glissant un mot de soutient lorsque je sais que leur journée va être chargée, j'aime voir que je compte pour Lui avec une ligne ou deux.
Comme je pense à eux lorsque je croise un objet, une image qui puisse les faire sourire, j'aime Ses textos au seul but de me provoquer un sourire.
Comme  parfois j'ai des gestes de tendresse à mes monstres sans raison que l'envie, j'aime qu'Il pose sa main sur moi, m'ébouriffe les cheveux.
Comme je rassure mon SimOne sur son apparence sans pour autant la rendre Bimbo égocentrée, lui donnant un avis le plus objectif possible, des conseils, j'aime qu'Il remarque mes efforts d'apparence, Ses sourires lorsque je suis apprétée, ou Ses remarques constructives.
Comme lorsque j'ai des décisions à prendre les concernant je ne pense qu'au meilleur, j'aime l'idée qu'Il en soit de même lorsqu'Il a à en prendre.
Comme lorsque j'ai un comportement qui pourrait gêner mes enfants je prends en compte ce qu'ils me disent, j'aime qu'Il fasse de même.
Comme lorsque je dois leur apprendre à gérer leurs interactions sociales sans pour autant chercher à les brider, j'aime qu'Il porte un œil avisé sur les personnes que je croise.
Comme le temps que je passe sans eux me voient penser à eux tout de même, j'aime savoir que Lui aussi pense à moi.
Comme il n'y a pas d'amour, mais que des preuves d'amour, comme je m'y applique avec mes enfants, j'aime qu'Il me le prouve...

Vous direz que je semble exiger beaucoup, mais qu'est ce que j'offre en échange?
Eh bien, qu'attendez-vous de vos enfants si ce n'est en faire de belles personnes dont vous serez fier?
Non pas parce qu'ils seront devenus ministres, astronautes ou "chef de diamètre, parce que moi, je suis chef de rayon", mais parce que ce seront des êtres humains que vous aurez permis de rendre fréquentables, aimables...

Et que, ne nous leurrons pas, j'adore l'idée d'en plus d'être celle qui Lui donne du plaisir comme Il me montre qu'Il aime en prendre....

De Mater à Master, il n'y a que le S de sexe qui change...
Les responsabilités sont les mêmes, pour les mêmes résultats (avec le cul en plus!!)



*ABDL: l'Adult Baby Diaper Lover est une mouvance qui se retrouve dans le BDSM où des adultes revêtent tous les atours inhérents à la condition de bébé et souvent se comportent comme tels, du port de couches qu'ils salissent ou non et qu'il faut changer (serai-ce un prétexte pour pratiquer l'uro et la scato? hinhinhin...), de l'allaitement au biberon ou au sein (adeptes de la lactation érotique), sans qu'il y ai obligatoirement de rapports sexuels, mais une attention complète de la "nurse".

*Age Play: le Dominant est le "Daddy" et la soum bien souvent une lolita. Et s'il est tentant d'y voir un palliatif à des tendances pédophiles, je ne pense pas que ce soit le cas, mais bien plus simplement un jeu de rôle qui permet à la soum de se conduire en petite princesse gâtée.