jeudi 7 avril 2016

En attendant Pénélope...

Il est des insectes comme des humains... certains sont dits holométaboles... à métamorphose vraie... une différence de morphologie que vous comprendrez facilement en comparant une chenille et un papillon... la même espèce et pourtant rien de commun entre la larve et l'imago... entre les deux modes de vie,  il existe un temps de pause, de fragilité et d'immobilité... la nymphe... un stade de transition nécessaire à toute révélation....

Quinze jours… quinze jours déjà se sont écoulés depuis ce like à photo… la chasse à la Chapine est devenue une aventure et je continue à en écrire les mots… La brume se déchire et je commence à entrevoir le soleil, à ressentir la chaleur de l’astre, à percevoir sa lumière vive. Il me redonne le vert aux yeux. Désormais, ce n’est plus le manque d’elle qui me torture, maintenant, c’est l’envie qui me titille… le coin de mes lèvres se rehausse, le sourire n’est pas loin… Il m’est toujours difficile d’exprimer ce que je ressens et pourquoi j’entreprends ce projet insensé, sans entendement pour l'homme sage que je suis… Je m’interroge sur cet élan qui me porte vers elle, toujours sans savoir, sans en comprendre le sens… Inutile de résister, ma pile me pousse droit vers mon inventaire, vers mon bilan de mi vie ou de mi mort c’est selon… elle en est le catalyseur et il faut que j’aille au bout de la réaction.  Peu importe le temps et la raison, je n’ai rien d’autre à faire et cela m’est absolument nécessaire… Je vais sans doute garder quelques séquelles de cette rencontre. Le choc a été magnifique. Je ne m’imaginais pas être dans un accident de ma vie. Mais le constat signé me prouve bien que nous nous sommes arrachés trop d’émotions, trop de sentiments pour que je ne garde pas son empreinte, son relief, un peu de tôle froissée. Ce n’est rien, je ne souffre pas… mais ce lien m’intrigue toujours … il n’a pas d’origine, une solidarité sans prétexte, sans événement ou moment pour la générer comme un état de fait. Mais qu’est-ce que c’est ? Une évidence, une rencontre, un paradoxe ! Oui ! Mais oui, je sais ! C’est une quête ! Une quête du genre infernale ! Serait-ce alors de la prémonition, de l’intuition, une fiction… ? C’est pourtant bien le titre d’une œuvre de fiction !... Mais quelle évidence ! A la lecture des quelques chapitres de cette aventure, elle m’avait découvert et capté entre les lignes. Je suis dans la délivrance de ce que je suis, de ce que je porte, de ce que je vis, de ce que je veux… elle en est le révélateur. D’ordinaire, je me livre peu, je parle peu, mais depuis quelque temps, j’écris beaucoup. Extraordinairement, je suis plus à l’aise avec les mots que l’on couche. J’aime avoir le temps de les choisir, de les assembler, de les pousser à décrire ce que je ressens vraiment. Ils disent ce que je suis sans me trahir. Alors je continue à en écrire, ce n’est plus mon choix, comme un automatisme, une sauvegarde…

Nous avons agi en symétrie comme à travers un miroir et nos points communs se sont révélés au fil de nos discussions… Mon image a souvent l’apparence d’une personnalité détachée, neutre, lisse, souriante et tranquille, quoique parfois un peu impulsive mais sans plus. Ce reflet me protège donc… Mais combien sont vraiment ceux qui peuvent me détecter, imaginer le monde de mes idées, le bouillon de mon intellect, mes revendications de liberté, la violence de mes envies ? Et pourtant ! Je suis bien ce solitaire non asocial, cet individualiste à l’esprit collectif, cet anarchiste sans subversion, ce rocker sans cuir, cet avatar de prince charmant sans reine, ce garçon qui joue à la poupée… Je suis cette contradiction, complexe et adaptable, et il me plait souvent d’en jouer pour incarner un agent secret de pacotille, juste pour avoir le plaisir de temps en temps de griller ma couverture… pour me révéler,  pour faire tomber mes artifices, pour me livrer à celle qui saura me démasquer… pour dire en vérité ce que je suis...  un homme à la simple profession de cuniculteur, surtout lorsque je suis hors cadre, hors temps, hors phase…


Pourtant, je peux l’affirmer, personnellement, je ne m’intéresse absolument pas. Les autres et elle en particulier, oui ! Je sens qu’elle est pétrie de ces antagonismes qui me plaisent. Je lui ai montré ce que je percevais d’elle. Je lui ai prêté mon tain pour lui prouver qu’il reflétait son esprit, celui d’une femme belle et forte, d’une mère aimante, d’une amie précieuse… Mais sait-elle que je porte en moi les germes d’une quête ? Et aussi étonnant que cela puisse paraître, je sais que je la retrouverai toujours, même avec des mots, même rien qu’avec mes mots… Je suis bien armé… Je vous préviens que j’ai la puissance de feu d’un croiseur et des flingues de concours (merci mon Raoul) et je ne vais pas hésiter à m’en servir. Voyelle ? Non, Consonne ! Et je choisis le S ! S comme Soumise ! S comme Slave ! S comme Secrète… Telle est ma vie désormais… je l’ai voulue de ma pleine volonté en priant un jour de retrouver le S perdu de ma vie... et de pouvoir la conjuguer à nouveau au pluriel....

Dans ma vie secrète, l’amour des mots me suffira t’il à panser mes maux ? Je le crois, en tout cas, j’ai foi en moi malgré tous ces doutes qui m’assaillent. Ils sont le sel que je réclame, ce goût de la vie passionnée et sauvage. Cela me va très bien, j’ai toujours eu une sainte horreur des voies tracées, des routines, des garde-fous… Je lui ai déjà écrit que je ne portais aucune réponse à nos échanges car je ne résonne jamais en destinée. J’influence le hasard, je joue de l’incertain, j’empile les événements… Pour quel résultat ? Je ne veux pas le savoir ! Les certitudes me déplaisent, l’incertitude me met à l’aise. Est-ce que je peux gagner à cette loterie peu ordinaire?… Je ne le crois pas ! A moins que le chaos veuille me récompenser !… Mais j’aime bien miser, juste pour voir, juste pour avoir le droit d’espérer qu’un Lundi de ma vie, je pourrai la rencontrer sur le front de son lit... pour la voir,  la toucher, la serrer dans mes bras, sentir son extrait, goûter ses lèvres, entendre les frémissements de son cœur… rien n’est jamais définitivement écrit dans nos vies, et désormais c’est moi qui tient le crayon… C’est le symbole de mon pouvoir… je le prends… Ah! Ah ! Par ici les mots, je force le destin, je conteste l’autorité, je dépose le temps, j’explose les limites… là est mon véritable caractère… Ah ! Ah ! Moi ? Un pseudo dom ? Ah ! Ah ! Dans ma vie secrète, je suis un retors, un irrévérencieux, un non conventionnel, un intemporel… tueur à gage et mateur de fauves… non pas les dents… pas les griffes non plus… Ruhe ! Ruhe !!! Komm her ! Ya ! Ya ! Du bist schön, sehr schön… il y a que l’Allemand pour causer à ce genre de furie, tous les grands dresseurs le savent.

Enfin furie ! Je l’ai tout de même touchée en plein cœur, elle qui était si sensible… Je l’ai apprivoisée… réussi à accéder à son esprit à grand coup de sourire… ça, c’est l’effet de mes mots trop rigolos, de mon versant soulane toujours bien exposé à la lumière… J’y souffle le chaud, capable d’empathie, intuitif à l’extrême, parfois jusqu’à la naïveté, mais toujours attentionné, prêt à écouter, à consoler, à échanger, à débattre, à rire, à aimer… L’ombrée laisse filtrer des sentiments plus noirs, quelques vapeurs de ces trahisons involontaires, mais je sais pardonner lorsque je comprends enfin les raisons de leurs origines. Sans nous connaitre, sans nous voir, je lui ai confié ces pans de mon âme en toute confiance. Je savais qu’elle ne me jugerait pas.  D’ailleurs, je ne suis coupable de rien, elle non plus… Deux innocents en face à face, nous n’avions plus besoins de nos armures et de nos masses… nous avions juste un peu de tendresse à nous jeter à la figure, pour le plaisir de se lire, de se taquiner, de se dire tu me manques… A cet hiver !

C’est l’hiver dans ma vie. Le gel me pique. Il me prouve que je suis vivant, très vivant même. Ma pile tourne à plein régime. Elle ne se décharge plus. J’ai inventé le rêve perpétuel. Je pense à elle tous les jours. J’ai parfois des envies subites de lui écrire. Je charge ma messagerie, prêt à lui demander comment elle va,  puis je me ravise, je referme la fenêtre. J’ai froid. Mais la saison annonce le renouveau, l’explosion des couleurs après le gris, la résurgence des eaux après l’embâcle, l’air chaud et sec d’un vent perdu. Je tiens toujours mes promesses, c’est une qualité de ma très bonne moralité. Donc ? Donc, je dois utiliser d’autres stratégies pour arriver à la surprendre, à la renverser, à la déborder comme elle l’imaginait des actes de notre rencontre à venir. Elle m’avait parlé de ses envies et je pensais que j’aurais pu me plier aux quelques règles du jeu qu’elle avait édictées. Laisse-moi ce temps de basculer avec toi ! Juste pour voir si je peux te retenir, juste pour voir si tu peux me retenir… L’équilibre à deux est une figure impossible à tenir à moins que nous soyons en train de tomber ensemble dans le vide… Je n’ai pas peur… je sais voler… et toi ?

Elle savait que nous nous étions d’abord trouvés par des mots… Elle m’avait même remercié d’avoir écrit les premiers de nos échanges. Pourrais-je la retrouver au coin de sa vie avec un conte à dormir debout ? Je n’ai toujours pas de réponse, je suis dans l’action, mû par cette seule volonté de rester avec elle… loin d'elle… j’adore ce paradoxe… alors j’écris pour garder le lien, tenir la ligne de vie… et ça, c’est une sacrée ambition ! 

Quel drôle de vie, cette vie secrète ! Je me surprends à sourire au rappel de ces souvenirs de notre rencontre,  Du grand n’importe quoi, je ris de ma nostalgie… J’ai pourtant du travail qui m’attend, pas le temps pour la ritournelle de Cassandre. J’ai une guerre à entreprendre et des plans secrets à élaborer. Les règles de l’engagement seront les miennes et se plieront à mes choix, facile d’imposer quand on veut décider. Dans mon monde absurde, il n’y aura pas de limites, car elles signifient forcément qu’il y a une fin…  il n’y aura pas non plus d’impatience, car le temps n’a plus de prise… mais il y aura la force de ma rage pour infléchir ce dessein et ne plus entendre le vacarme du destin… Oui j’ai toujours mal aux oreilles et je ne supporte plus d’être sourd à cause de cette fatalité qui m’entraine vers ce que je ne veux plus être… Je sens cette distorsion qui me pousse dans le ventre, cette envie de ne plus paraître ici mais ailleurs. Dois-je céder à mes retrouvailles ou est-ce les bans de mes funérailles que je publie? Je suis déjà mort plusieurs fois pour souvent renaître le jour même, toujours avec des promesses à tenir au passé.  Je ne me cherche pas d’avenir, je veux être le futur, m’extraire au-delà de la raison, des limites et du temps, juste pour avoir le plaisir de la surprendre encore une fois. Ah ! Ah ! Je suis bien un aliéné, et j’ai juste à activer mes synapses pour recouvrer la liberté... ce n’est pas si infernal que ça !!! Ah ! Ah ! Même pas mal ! Si c’est possible ! Ah non pas les pilules bleues !!!

" Quoi Jean Jacques ! T’es encore là ? Tu veux encore me chanter une reprise ? Non, un texte original… non, c’est pas vrai ! Tu l’as écrit quand ? A l’instant ! Et bien pour une surprise c’est une surprise ! Vas-y, je t’en prie,  je t’écoute…. Comment ça rien ?! Ah non, le titre c’est « et on n’y peut rien »… Oui, oui j’ai compris… je t’écoute…

Comme un fil entre l'autre et l'un,
Invisible, il pose ses liens
Dans les méandres des inconscients, Il se promène impunément
Et tout un peu tremble, Et le reste s'éteint
Juste dans nos ventres, Un noeud, une faim
Il fait roi l'esclave, Et peut damner les saints
L'honnête ou le sage, Et l'on n'y peut rien
Et l'on résiste on bâtit des murs, Des bonheurs, photos bien rangées
Terroriste, il fend les armures, Un instant tout est balayé
Tu rampes et tu guettes, Et tu mendies des mots
Tu lis ses poètes, Aimes ses tableaux
Et tu cherches à la croiser, T'as quinze ans soudain
Tout change de base, Et l'on n'y peut rien
Il s'invite quand on ne l'attend pas, Quand on y croit, il s'enfuit déjà
Frère qui un jour y goûta, Jamais plus tu ne guériras
Il nous laisse vide, Et plus mort que vivant
C'est lui qui décide, On ne fait que semblant
Lui, choisit ses tours, Et ses va et ses vient
Ainsi fait l'amour, Et l'on n'y peut rien

Et bien je n’ai plus rien à dire Jean Jacques… pour le coup là, je crois que tu as vraiment compris ce que sont les symptômes de ma PCAR. Merci mon frangin, cela me touche vraiment que quelqu’un réussisse enfin à me comprendre. J’espère que quelqu’une pourra y arriver aussi… mais rien n’est perdu, puisque je continue à écrire… Merci Jean-Jacques… Je suis vraiment touché...."

Je ne suis pas serein. Pourquoi le serais-je ? La sérénité est un état du néant, une morne plaine sans champs de bataille. Plus d’envie, plus de vie, la mort. J’ai déjà froidement exécuté quelques amis et le paternel. Mais le légataire universel me propose toujours de son sel. Je dors du repos du guerrier en attendant que la guerre soit à nouveau déclarée. Elle sera déraisonnable, joyeuse et surprenante. Je suis en vie secrète...

1 commentaire:

  1. Par discrétion, je passerai silencieusement sur Cassandre, même s'il y a beaucoup à dire sur le thème du choix, du non-choix, plutôt.

    Il est certain que ton Chatpin est une sacrée débatteuse ! Ca ne m'étonne pas que vous vous soyez trouvés.

    Bonne route à vous deux.

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